Au tour du centre
de vous à moi
"Le meilleur mensonge, c'est dire qu'on ment"
Albertine Leblase, lettre à mon père
Devant les infos de la télé, la radio, les journaux papiers ou en ligne ne nous arrive t'il pas de nous sentir séparés du monde en apprenant ce qu'on nous dit qu'il serait advenu?
Sachant que séparé n'est pas forcément exclu, mais veut dire qu'il y a d'un côté le monde, cet espace bourré de vous tous les autres milliards de gens, et de l'autre côté nousmoi, ce déroulement de vie trébuchante?
D'un côté la force du Temps et avec lui l'Histoire, de l'autre le nez sur le guidon et l'oubli que nos esprits sont bien trop étroits pour saisir l'ensemble?
Nous avons le réflexe de croire que nous comprendrons le vrai, et saurons donc discerner le faux, comme si le vaste cosmos était à notre dimension, comme si l'extraordinaire différence entre Pierre et Paul n'existait pas.
Il est certain que les évènements ne se déroulent pas vraiment tels que les petits cerveaux des rédactions de presse nous racontent. Mais c'est plus parce que les journalistes sont enfermés dans le bocal du scoop et de l'annonce, et non pas parce qu'ils attendent un coup de fil du Grand Pouvoir ou des Grands Intérêts qui les sommeraient de dire tel ou tel déroulé, sciemment mensonger.
Nos aïeux reposaient souvent sur le bouche à oreille pour avoir des "nouvelles" (qui n'en étaient plus tant le phénomène était lent) et étaient tributaires de la dérive des transmissions subjectives.
Nous sommes au contraire perpétuellement sollicités par des alertes venant de la Terre entière (Terre dont nous ignorons la réalité dans sa diversité), allant du niveau chat écrasé aux décisions géopoliques gobales, comme si nous étions formés et informés pour en saisir les signifiants.
Ce n'est pas le cas bien sûr, pourtant ce qui est commun aux deux époques, c'est que nous appréhendons le monde à l'aune de nos ethnocentrismes et nos égoïsmes, lesquels reflètent en général nos petites connaissances et nos petits intérêts (ou ce que nous croyons être nos intérêts).
Quoiqu'il en soit, lorsqu'une actualité bouleversante nous tient soudain tous en alerte, au moins quatre attitudes se distinguent:
- On avale tout sans discernement.
- "On n'y peut rien!" (le pire, d'après un sondage au sein des Ets leblase))
- On intègre l'évènement au sein de la chaîne qui l'a constitué, et l'on tente d'en deviner le prochain maillon.
- On refuse d'y croire.
Là encore, deux autres attitudes paraissent prépondérantes:
l'une pense qu'on a mal compris mais que tout va s'éclairer.
l'autre pense que c'est une désinformation voulue, qu'on nous cache la vérité.
N'est-il pas amusant de constater que le village global à une grosse tendance à se transformer en forum de concierges?
Qu'au moment où l'on dispose de la fonction d'immersion et de partage, on se replie sur son petit soi tiédasse?
Le réflexe complotiste, manifestation paranoïde à propension universaliste n'est-il pas à la fois le refus du changement et le refus de la différence?
Ce refus n'amène t'il pas souvent à chercher un bouc émissaire?
Un sournois, un traître, un espion, qu'en dénonçant on pourrait éliminer dans l'illusion de repeindre un monde plus conforme à l'étroite chose qu'on est capable d'appréhender?
Le méchant est-il vilain?
Dans ces instants, ne vous vient-il pas à l'idée que le monde serait vrai et vous, faux?
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