le mètre altère
"La première conséquence de l'unité, c'est d'exclure"
Si les "relations" que l'on entretient quotidiennement avec des "proches" que l'on ne voit plus depuis des années, ainsi qu'avec le vaste monde devenu si accessible ne sont pas devenues aussi réelles qu'un théâtre en tournée.
Le discours absurde de nos faux experts nous parle d'un monde de plus en plus irréel et insensible, sinon insensé et surtout sans conséquences.
Prenons un exemple tout bête: je sais parfaitement que des dizaines de milliers de gens sont en train de mourir de faim en Somalie (c'est un exemple).
En lisant la presse j'apprends ce serait la conséquence des guerres (dont par ailleurs on ne dit jamais l'origine).
En lisant ce que je vais chercher dans la sphère économique, je vois bien que cette famine est surtout le résultat de la curée financière de ce début d'année sur les matières premières alimentaires devenues un enjeu spéculatif qui d'un côté a accru la fortune de certains et de l'autre a rendu la bouchée de pain hors de prix pour le petit paysan du tiers-monde incapable d'acheter de quoi semer, ou le pauvre citadin jeté hors de chez lui.
Suis-je plus proche de ceux quji crèvent dans une misère abjecte digne des plus sombres récits de l'Histoire, une horreur que je n'aurais plus cru possible il y a quinze ans quand je faisais de l'humanitaire à la con?
Ou suis-je plus proche des brillants traders qui ont utilisé à peu près les mêmes canaux dont je me sers pour écrire ce billet?
C'est ainsi que ces notions de distance et de contact échappent au rationnel.
Elles m'éloignent d'abord de moi-même en me permettant sans culpabilité une compassion de trois secondes, une colère vertueuse de cinq secondes (le temps d'envoyer un touit hashtaggé).
En altérant ma sensation de distance à l'autre il y a risque, par suite de dépendance à ce 2.0, d'étouffer mon humanité plus sournoisement mais aussi bien qu'en absorbant le discours fasciste recommandant d'exclure progressivement les laissés pour compte, les différents, les autres.
Les papys et mémés qui hurlaient au téléphone durant les communications longue distance n'avaient-ils pas finalement raison?
Comment perçoit-on le non-dit, le frisson, le battement d'un coeur sur un écran?
Puisque celui qui est loin est plus facile à contacter que celui qui est près, où sommes-nous?
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